jeudi 12 octobre 2017

Llamber, Barcelone




Probablement l’un des endroits les plus branchés en ce moment à Barcelone, « Llamber » ne semble pas désemplir au vu des difficultés à obtenir une réservation. Mais alors quelles sont les raisons de ce succès ? Tout d’abord l’emplacement est plutôt idéal, la très belle place de l’ancien marché du Born. Mais bon cela ne fait pas non plus tout. Il faut aussi considérer que l’intérieur a été magnifiquement rénové, que la cuisine se veut bistronomique et suit les concepts du « Slow Food » qui est comme on le sait la plupart du temps gage de qualité. Ce ne sont pas les autres établissements que j’ai visité qui me feront mentir.


Ouvert en 2012, il s’agit en fait du second « Llamber », le premier se trouvant à Avilés, une petite ville des Asturies sur la côte nord-ouest de l’Espagne. Un gastrobar ou taverne gastronomique, qui propose une cuisine de marché aux influences asturiennes, des assiettes à se partager avec toujours un élément créatif même si certaines recettes sont plutôt classiques. En cuisine le chef Francisco (ou Fran) Heras et en salle Eva Arbonés comme maitre d’hôtel. Ce chef ayant fait ses écoles chez El Bulli, à Miami et ensuite chez Arola de l’Hotel des Arts à Barcelone.

Comme précédemment indiqué, vous aurez meilleur temps de faire ne réservation car autrement vous attendrez un certain temps à l’extérieur un verre à la main. A noter que malgré cette réservation, nous avons bien dû attendre une vingtaine de minutes, le service ce soir-là semblait être un peu dépassé par les événements. Ma recommandation c’est de ne pas venir avant 22 :00 à 22 :30 ou tout rentra parfaitement dans l’ordre avec un service à table absolument parfait.


L’intérieur, un ancien entrepôt de fruits de 1890 a été magnifiquement rénové comme dans peu d’endroits et surement avec pas mal de moyens. De grands espaces, de hauts plafonds, un choix de matériaux très à la mode, briques blanches, lumières industrielles et bois. Quelque chose peut-être aussi inspiré par certains établissements de New-York. Plusieurs salles avec tout d’abord le coin bar sur le devant avec des tables hautes et aussi la possibilité de manger au bar. Je recommande plutôt de faire une réservation dans la salle arrière qui est beaucoup plus confortable, moins bruyante et surtout moins de passage. Question de goût.



La petite salle à l’entrée me sembla plus adaptée pour un repas sur le pouce, pour quelques tapas avant ou après un spectacle, bien que vous puissiez être casé là au cas où vous n’auriez pas de réservation.


Même si je n’ai pas pris de cocktail ce soir, je dois avouer que ceux-ci semblent être particulièrement sophistiqués et délicieux.  Le bar est vraiment très beau et l’ambiance y est plus que festive au vu du volume sonore et du défilé de verre servis en quelques dizaines de minutes. Ces cocktails étant servi dans de jolis verres d’une autre époque mais qui reviennent sensiblement à la mode.






Face à ce bar, une très sympathique table haute plutôt réservée aux groupes d’une dizaine de personnes. Même si au centre du restaurant, elle reste plutôt assez préservée du passage entre les deux salles. Table de bois joliment éclairée par des lumières industrielles.



Une séparation réalisée avec des meubles et vous voilà dans une seconde salle, celle-ci face aux cuisines. En fait il y a trois salles mais ne pensez pas que le lieu est immense et sans charme. Au contraire tout a été parfaitement étudié pour préserver malgré tout un côté assez intime. Un mélange de murs de briques et de vieilles planches de bois sur les murs. Les lumières elles ici sont aussi particulièrement bien étudiées.



Et face à cette salle, la cuisine partiellement ouverte.



Mais c’est selon moi la dernière pièce qui a le plus de charme avec ces consoles sur lesquelles se trouvent des bougies. Dans un coin, d’ancien frigos aux portes boisées, un très joli chariot en vieux bois avec de la vaisselle et des bouteilles. Au fond le cellier avec les bouteilles qui semblent voler dans l’air.





Une fois installé à l’une de ces tables de vieux bois, nous voici proposés la carte avec des assiettes pour « piquer » et de petites assiettes. Selon moi il faut panacher les deux et dans tous les cas partager. Deux styles de cuisine, une première plus genre tapas catalans traditionnels comme des patatas, des fritures de poisson, du jambon, des fromages et une seconde plus sophistiquée avec des influences donc Asturiennes. Cela sera plutôt celle qui nous séduira.


Une première assiette avec un carpaccio de betteraves, crevettes, yoghourt, framboises et pistaches. Betteraves rouges en rosace, le yoghourt comme entourage, les crevettes justes snackées et les autres éléments sur les côtés. On identifiera également quelques jeunes pousses et une sauce probable à la pistache. Plutôt simple mais agréable, frais et léger.


Les croquettes maison au jambon ibérique sont ici exceptionnelles. Certes on peut manger des croquettes un peu partout mais combien sont à la limite d’être mauvaises, grasses, pâteuses et j’en passe. Ici la farce est simplement parfaite.


Une agréable découverte avec ces champignons maïtaké des Pyrénées, sautés sur une émulsion de cèpes, et son huile. Champignon utilisé dans la médecine chinoise traditionnelle et au Japon depuis des siècles, le maïtaké tire son nom d'un mot japonais qui veut dire « champignon dansant ». C'est un petit champignon brun à lamelles qui se développe en grappes amalgamées sur les souches et les racine comme par exemple au pied de feuillus comme les chênes. Surprenant par sa texture, à la fois filamenteuse et ferme, presque croquante. Surprenant enfin par son goût, dans lequel on retrouve la noisette et d’autres saveurs insaisissables mais pourtant familières. C’est probablement pour cela qu’ici il est sublime par les saveurs du cèpe.


Nous poursuivons avec un étonnant plat, le poulpe gratiné au fromage Gamoneu D’Onao, sauce à l’ail et mousse de pommes de terre. Une réinterprétation de l’association poulpe – pommes de terre mais cette fois de manière encore plus gourmande avec cette sauce à base de fromage asturien aux laits des trois espèces mélangés (à parts égales, chèvre, brebis, vache). Il est à pâte molle, à caillé égoutté spontanément et à croûte fleurie, un peu fumé. Un fromage de fabrication fermière qui possède en fin de maturité des moisissures internes. Le tout associé à une fine et gourmande mousseline de pommes de terre.


Puis un riz « Senyoret » au poisson du jour et aïoli d’ail noir. Un plat qui signifie « riz du petit Monsieur », mais il faut le comprendre dans le sens « riz de l’homme précieux ».  La légende raconte que dans un restaurant de la cote Valencienne, un homme un peu précieux avait l’habitude commander un riz en paella aux fruits de mer, mais ne voulant plus : ni se salir les doigts en mangeant, ni se servir de son couteau, demanda au restaurateur de trouver une solution. Celui-ci réinventa le plat sans changer les ingrédients, mais avec les crustacés décortiqués et juste la chair des poissons. Ici avec une touche asiatique liés à l’utilisation de cet ail conditionné à la japonaise.  Un riz certes classique mais excellent.




Alors là je dois avouer que je ne me rappelle plus vraiment de l’intitulé de ce plat qui probablement était en suggestion ce soir-là car impossible à trouver en photo sur des sites, un genre « terre et mer » avec poisson, gambas, poitrine de porc, morceaux de pains imbibés d’encre de seiche et une huile d’herbes. Tout est parfaitement sauté sur la plancha, les saveurs sont justes.


Et pour finir un délicieux boudin noir avec des calamars grillés et réduction de jus d’encre de seiche. Une morcilla de qualité avec à l’intérieur du riz, les petites seiches sur le dessus, une huile de persil tout autour. C’est gourmand et parfaitement cuisiné.


Pour les amateurs de riz au lait, celui-ci est mémorable car on a l’impression de manger une crème catalane avec du riz. Un goût inoubliable, une texture parfaite, un croustillant sur le dessus et juste le liquide nécessaire pour ne pas le rendre trop compact.


Sur les recommandations du sommelier, une bouteille de Costers del Segre Tomas Cusiné Geol Old Vines. Très élégant, sombre, des arômes de mures, de chocolat noir, d’anis et un peu fumé.


Une belle expérience que cette table très courue de « Llamber » mais que l’on peut vivre probablement de différente manière en fonction d’où l’on se trouve et de ce que l’on mange. Les différentes salles proposent peut-être sans trop le savoir des ambiances et du service différent. Comme écrit au préalable, les deux salles du fond sont plus propices pour découvrir cette cuisine catalo-asturienne soignée, gourmande et parfois originale. Le cadre est magnifique et l’ambiance propice pour des soirées animées et festives.

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